Pape, Religieux (Histoire, Religion).
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Giovanni Maria Mastai Ferretti a été pape sous le nom de Pie IX (en latin Pius IX, en italien Pio IX). Il est né à Senigallia (Italie), le 13 mai 1792 et mort au Vatican le 7 février 1878 à l'âge de 85 ans. Son pontificat de 31 ans est le plus long de l'histoire de la papauté.
Pie IX est le pape qui a proclamé le dogme de l'immaculée conception.
Il convoqua le premier concile oecuménique du Vatican qui définit notamment l'infaillibilité pontificale. Ce concile fut interrompu quand les troupes italiennes envahirent Rome. Pie IX fut également le dernier souverain des États de l'Église qui disparaissent en 1870.
Il a été proclamé bienheureux par l'Église catholique en 2000.
Giovanni Maria Mastai Ferretti était le fils du Comte Girolamo Mastai Ferretti et de Caterina Solazzi, qui eurent 8 autres enfants. Après avoir fréquenté le collège piariste de Volterra, il étudie la théologie et la philosophie à Rome. Il est ensuite refusé chez les gardes nobles à cause de sa santé (il est sujet à l'épilepsie) et il poursuit ses études au séminaire romain.
Ordonné prêtre en 1819, il est nommé directeur spirituel d'un célèbre orphelinat romain. En 1823, Pie VII l'envoie au Chili en tant qu'auditeur de Mgr Muzi, délégué apostolique. En 1825, à son retour, il est nommé par Léon XII chanoine de Sainte-Marie de Via Lata et directeur de l'hôpital San Michele. En 1827, il est fait archevêque de Spolète. En 1832, il est transféré au diocèse d'Imola.
En 1840, il reçoit le chapeau de cardinal-prêtre du titre des Santi Marcellino e Pietro.
Le 16 juin 1846 a lieu le conclave suivant la mort de Grégoire XVI. Le cardinal Luigi Lambruschini, Secrétaire d'État de Grégoire XVI, est le candidat des conservateurs tandis que Mastai Ferretti est le candidat des libéraux.
Lambruschini obtient la majorité des voix dès les premiers tours, mais ne parvient pas à recueillir les deux tiers des voix requis pour être élu pape.
Le cardinal von Gaisruck, archevêque de Milan, arrive trop tard pour remettre l'exclusive prononcée par l'Empereur d'Autriche Ferdinand Ier, suivant la politique de Metternich, contre Mastai Ferretti ; celui-ci ayant recueilli les deux tiers des voix accepte la tiare et prend alors le nom de « Pie IX », en hommage à Pie VII.
Pie IX bénéficie à cette époque d'une grande popularité au sein de la population italienne : durant son épiscopat en Romagne, il n'a pu ignorer les besoins de réformes dont souffrait l'État pontifical et que le soulèvement de Rimini, en 1845, avait démontré. Les premières années de son pontificat sont marquées par des mesures libérales qui s'opposent aux méthodes de Grégoire XVI et de son secrétaire d'État, le cardinal Lambruschini. Il choisit pour secrétaire d'État le cardinal Gizzi.
le 16 juillet 1846, il décrète une amnistie générale pour les détenus politiques et fait préparer une constitution qui est concédée le 14 mars 1848. C'est le Statut fondamental pour le gouvernement temporel des États de l'Église qui instituait deux Chambres et le Sacré Collège des cardinaux présidé par le pape. C'est l'époque des réformes politiques.
Il crée le Conseil d'État.
Il institue la liberté de la presse.
Il établit une commission laïque chargée de la censure ;
en 1847, il établit ainsi une Consulta, un conseil consultatif composé de laïcs dont le rôle est de lui transmettre les désirs de la population ; et, auprès de lui, un conseil de cabinet puis une garde civique. Il crée également un certain nombre de commissions auxquelles participent des laïcs, afin de réviser les lois.
Cette période est également celle de l'entrée dans la modernité pour les États pontificaux : à la différence de Grégoire XVI, qui les considérait comme « les chemins du diable », Pie IX fait construire dans les États pontificaux des réseaux ferrés et télégraphiques ; il restaure l'éclairage public.
En 1847, il s'oppose à l'Autriche qui avait fait occuper la ville de Ferrare alors qu'elle n'avait le droit que d'avoir une garnison dans la citadelle. Pie IX devient l'espoir des patriotes italiens, sa popularité est alors immense.
Ce mouvement réformiste qu'il contribue à amorcer par ses choix personnels lui attire bientôt la sympathie des nationalistes dans l'ensemble des États italiens (Toscane, Deux-Siciles, Piémont, Parme ...) : certains d'entre eux n'hésitent pas à souhaiter la réalisation d'une fédération italienne, dont il prendrait la présidence.
Victor Hugo prononce à la Chambre des pairs le 13 janvier 1848 un éloge vibrant de Pie IX : « Cet homme qui tient dans ses mains les clefs de la pensée de tant d'hommes, il pouvait fermer les intelligences; il les a ouvertes. Il a posé l'idée d'émancipation et de liberté sur le plus haut sommet où l'homme puisse poser une lumière. [...] ces principes de droit, d'égalité, de devoir réciproque qui il y a cinquante ans étaient un moment apparus au monde, toujours grands sans doute, mais farouches, formidables et terribles sous le bonnet rouge, |...] il vient de les montrer à l'univers rayonnants de mansuétude, doux et vénérables sous la tiare. [...] Pie IX enseigne la route bonne et sûre aux rois, aux peuples, aux hommes d'État, aux philosophes, à tous ». Ce discours est cependant mal accueilli dans une chambre conservatrice inquiète de la remontée en puissance des idées républicaines.
Pie IX est à ce moment « le pape des droits de l'homme ». Les événements vont en faire un bien différent « pape du Syllabus ».
En 1848, le « printemps des peuples » embrase l'Europe du Congrès de Vienne. Charles-Albert, roi du Piémont, déclare la guerre à l'Autriche. Le 24 mars, Pie IX autorise le départ de Rome pour Ferrare, d'un corps expéditionnaire de 7 500 hommes commandé par le général Durando, suivi deux jours après par un corps de volontaires, la légion des volontaires pontificaux (Legione dei Volontari Pontifici) formée d'hommes provenant du centre de l'Italie confiée au général Andrea Ferrari. Pie IX par l'allocution du consistoire du 29 avril 1848, condamne la guerre contre l'Autriche : « à nos soldats envoyés aux frontières pontificales, nous recommandons seulement de défendre l'intégrité et la sécurité des États pontificaux. Mais si certains souhaitaient que nous, ensemble à d'autres peuples et princes d'Italie, prenions part à la guerre contre les Autrichiens ... ce n'est pas dans nos intentions et nos recommandations », il conclut en invitant les Italiens « à rester attaché fermement à leurs principes dont ils en avaient expérimenté la bienveillance et qu'il ne s'en détache pas ». En fait, le pape se trouve dans l'embarras de combattre une grande puissance catholique : « nous avons su que certains ennemis de la religion catholique ont profité de l'occasion pour enflammer les âmes des Allemands afin de les détacher du Saint Siège ... Les peuples allemands ne devraient pas nourrir un sentiment de dédain à notre égard parce qu'il nous a été impossible de freiner nos sujets qui applaudirent les évènements anti-autrichiens en Italie septentrionale ... d'autres souverains européens, qui disposent d'armée plus puissantes que la nôtre, n'ont pu freiner l'agitation de leur peuple ». Cela met en évidence la contradiction et les incompatibilités de la position du pape comme chef de l'église universelle et en même temps chef d'un État italien ; entre le pouvoir spirituel et temporel. Il refuse donc de soutenir le mouvement d'unification, pour ne pas froisser l'Autriche catholique. Sa popularité s'effondre alors parmi les patriotes italiens.
Tout en étant désireux d'affirmer l'indépendance de la papauté, Pie IX doit accorder une constitution aux États pontificaux. Le 15 novembre 1848, le chef du gouvernement du Saint Siège, Pellegrino Rossi est assassiné et les insurgés proclament la République romaine.
Le 24 novembre 1848, Pie IX quitte de nuit dans la voiture à cheval du duc d'Harcourt son palais du Quirinal, après que l'attaque du palais par les partisans de Giuseppe Mazzini, tuant Mgr Palma. Pie IX se réfugie à Gaète, dans le Royaume des Deux-Siciles. Il lance un appel aux puissances européennes pour retrouver son trône. Rome devient une république. L'Autriche, le Royaume des Deux-Sicile et la France apportent leur soutien au pape. C'est cependant la France qui est la plus active, elle envoie un corps expéditionnaire commandé par le général Oudinot qui s'empare de Rome le 30 juin 1849 et chasse définitivement les révolutionnaires en juillet.
De retour à Rome le 12 avril 1850, Pie IX y mène une politique de répression contre les idées républicaines. Un nouveau secrétaire d'État, le cardinal Giacomo Antonelli, est nommé, renouant avec la politique conservatrice de Grégoire XVI.
Pour Giuseppe Mazzini et Giuseppe Garibaldi, Rome reste l'objectif principal de leur politique et en diverses occasions, Garibaldi organise des opérations militaires sans succès.
Pour s'opposer aux risques d'une annexion au royaume du Sardaigne, les troupes françaises restent stationnées dans les États pontificaux et les zouaves pontificaux sont créés en 1860 avec la bénédiction du pape et du franco-belge Mgr Xavier de Mérode. Ces derniers sont placés sous le commandement du général de Lamoricière, ancien de la colonisation d'Algérie et ancien ministre de la IIe république. Jusqu'en 1870, le recrutement se fait auprès des volontaires de France, des Pays-Bas, de Belgique, d'Italie, du Québec. La guerre franco-prussienne qui nécessite le départ des troupes françaises et l'armement obsolète des armées pontificales, malgré la victoire de Mentana contre Garibaldi en 1867 (où pour la première fois le fusil Chassepot est utilisé), permettent aux troupes italiennes de s'emparer sans difficulté de Rome le 20 septembre 1870. Le pape ordonne aux zouaves de n'opposer qu'une résistance symbolique.
Quelques années plus tard, la prise de Rome, le 20 septembre 1870, constitue un aboutissement à l'unification de la péninsule en faisant de la cité du pape la nouvelle capitale du royaume d'Italie.
Une loi des Garanties, votée le 15 mai 1871, accorde au Saint Siège un revenu annuel, l'extraterritorialité de quelques palais et les droits de souveraineté sur sa cité du Vatican, mais le pape Pie IX se considère désormais comme prisonnier à l'intérieur du palais du Vatican. Dans l'Église, l'émotion est grande. En France, la politique italienne de Napoléon III suscite l'indignation des catholiques pour qui le pouvoir temporel du pape garantissait son indépendance spirituelle. Pie IX apparaît alors comme « le pape-martyr ». Cependant le prestige moral de la papauté et l'autorité spirituelle qui en découle en sortent renforcés.
En dehors du problème du territoire de Saint-Pierre, Pie IX entend lutter contre les politiques anti-catholiques.
Il dénonce ainsi le Kulturkampf allemand dans la ligne de Bismarck ainsi que les violences exercées par les Suisses contre le clergé catholique : une encyclique de 1873 condamne les violences suisses. En 1874, le gouvernement autrichien rompt son concordat.
Cette époque est aussi celle d'une expansion de l'Eglise dans le monde. Pie IX crée de nombreux diocèses aux États-Unis, rétablit malgré l'opposition des protestants la hiérarchie en Angleterre (1850), en Hollande (1853), en Écosse. Il refonde le patriarcat latin de Jérusalem. De nombreux autres concordats sont également signés par le Saint Siège avec des États européens catholiques comme l'Espagne en 1851 et le Portugal en 1857, ou d'Amérique du Sud comme le Costa Rica et le Guatemala en 1852, le Nicaragua en 1861, le Venezuela et l'Équateur en 1862.
A l'accession de Pie IX au trône de Pierre en 1846, les juifs des États Pontificaux étaient soumis à un statut particulier dit de protection, la plupart étant les descendants des Sépharades expulsés d'Espagne ou rejetés par l'Empire ottoman ayant trouvé refuge auprès du pape. Ils étaient tenus de vivre dans des quartiers distincts (ghettos), ne pouvaient témoigner contre des chrétiens, avaient parfois l'obligation de suivre des sermons catholiques et étaient soumis à des taxes particulières, comme dans nombre de pays de l'époque (Autriche, Russie, Danemark, etc...). Le culte juif était le seul toléré en dehors du culte catholique dans les États Pontificaux, à l'exclusion des « hérésies » protestantes. Au début de son pontificat, Pie IX amorce des réformes en direction de la modernisation du statut des juifs et ouvre le ghetto de Rome parfois contre la volonté de certains rabbins. Il sera supprimé quelques années plus tard. Ces efforts ont néanmoins une portée limitée et sont interrompus avec l'éclatement de l'affaire Mortara. Pie IX conserve la position traditionnelle de l'Église catholique de l'époque, stigmatisant l' « aveuglement du Peuple élu » ; cependant bien que peu avare de propos virulents à l'encontre des « ennemis de l'Église », ses écrits, brefs et encycliques ne visent pas les juifs.
Le 23 juin 1858 à Bologne, la police pontificale perquisitionne la demeure d'un couple de juifs, Salomone et Marianna Padovani Mortara, et enlève un de leur huit enfants, Edgardo, âgé alors de six ans. Ce dernier est conduit à Rome et confié à une famille catholique pour être élevé dans la religion catholique sous le nom de Pio. Les autorités de l'Église justifient l'enlèvement par le fait que la servante de la famille, Anna Morisi, avait baptisé l'enfant, alors malade, de peur qu'il ne meure non-baptisé et n'aille dans les limbes. Le baptême d'Edgardo est en effet valide au regard du droit canonique quoique intervenu dans des circonstances contestables. Cette situation pose un sérieux problème juridique et spirituel et Pie IX doit arbitrer entre deux droits inconciliables. Celui de l'enfant d'abord : baptisé, il fait partie de l'Église catholique dans laquelle il a vocation à être élevé. Le droit naturel d'éducateur revenant à ses parents, ensuite, qui interdit de baptiser des enfants nés de parents non catholiques sans leur assentiment. Pie IX tranche dans le sens de ce qu'il estime être les intérêts spirituels d'Edgardo. « J'avais le droit et le devoir de faire ce que j'ai fait pour cet enfant, et dussé-je le faire encore, je le referais » dit-il en 1865.
La famille Mortara proteste et exige que son enfant lui soit rendu sans conditions et épuise tous les recours auprès du Saint-Siège.
Quoique non unique, l'affaire connaît un retentissement international inédit et la conduite de l'Église est largement dénoncée, y compris par l'empereur Napoléon III, alors même que la France exerce la protection militaire des États Pontificaux contre les italiens réunificateurs et anti-cléricaux.
Pour faire échec à des décisions de gouvernements catholiques étrangers qui exigent la restitution de l'enfant à sa famille, celui ci est déplacé clandestinement pour passer d'orphelinat en institution religieuse. Sous la pression de l'Église, une tentative de rencontre entre l'enfant et son père échoue, l'enfant ayant été convaincu que revoir son père, juif est un grave péché, sauf si toute la famille accepte de se convertir au catholicisme.
La famille demande continuellement la restitution de leur enfant, notamment à l'occasion de la prise de Bologne en 1859 par les Piémontais et de la chute de Rome en 1870. À sa majorité, Edgardo déclare son intention de rester catholique. Il entre dans la congrégation des Augustins en France et est ordonné prêtre quelques années plus tard. Jusqu'à sa mort en 1940, il défend la position de l'Église et témoigne en faveur de Pie IX lors de son procès en béatification.
La famille Mortara continue à ce jour à demander les excuses du Vatican et milite contre le projet de canonisation de Pie IX.
Pie IX déclare après 1870 que la perte de ses États est une punition des hommes pour la conversion « forcée » des petits juifs mais qu'il a sa conscience pour lui.
Contrairement à ce qui avait été envisagé en début de pontificat, Pie IX développe après la Révolution de 1848 une doctrine particulièrement conservatrice, voire sur certains points réactionnaire.
Le pontificat de Pie IX correspond à une réaction de rejet à l'égard de l'évolution libérale des sociétés européennes et plus largement des idées nées de la Révolution qu'il décide de combattre après 1848. L'industrialisation qui s'accélère au cours du siècle voit se développer en Europe occidentale une classe ouvrière déracinée : né en dehors de toute influence religieuse, le prolétariat est tenté par le socialisme. La politique comme chef d'état et l'enseignement de Pie IX comme pape est empreint d'une grande hostilité, à l'égard des idées modernes (libéralisme, matérialisme, socialisme, rationalisme) et de ceux qui les diffusent, en particulier les francs-maçons, regardés comme responsables de l'évolution libérale et laïque des États européens.
Le rationalisme et les idéologies scientiste et positiviste sont condamnées à partir de 1864 par deux documents, capitaux dans l'histoire de l'Église catholique contemporaine :
L'encyclique Quanta cura (1864)
Le Syllabus, liste de 80 propositions condamnées par l'Église, qui accompagne cette encyclique, la même année.
Dans le Syllabus, Pie IX condamne explicitement le rationalisme, la liberté d'opinion, la liberté de culte et la séparation de l'Église et de l'État.
En 1864, Pie IX explique le rôle qu'il entend assigner à l'école : « Les écoles populaires sont principalement établies en vue de donner au peuple un enseignement religieux, de le porter à la piété et à une discipline morale ».
Pie IX est mort au Vatican, le 7 février 1878, à l'âge de 85 ans. Sa tombe se trouve dans une chapelle derrière le choeur de la basilique Saint-Laurent-hors-les-Murs.
Si on met à part le pontificat de Saint-Pierre (v. 33/64), Pie IX eut le plus long pontificat de l'histoire de la papauté (soit 32 ans, de 1846 à 1878), avant Jean-Paul II (1978-2005) et Léon XIII (1878-1903). Il est béatifié en même temps que le pape Jean XXIII le 3 septembre 2000 par Jean-Paul II, non sans que cette béatification n'ait entraîné des polémiques.
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