Artiste, Écrivain, Éditeur, Homme d'affaire, Homme de loi, Magistrat (Art, Littérature).
Francais, né le 28 novembre 1965 et mort le 3 octobre 2005
Enterré (où exactement ?).
Guillaume Dustan aurait fêté ses 59 ans le jeudi 28 novembre 2024. Plus que 7 jours...
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Guillaume Dustan, de son vrai nom William Baranès, né à Paris le 28 novembre 1965 et mort à Paris le 3 octobre 2005, est un écrivain et éditeur français, magistrat de profession.
Fils d'une architecte d'intérieur et d'un psychiatre, Guillaume Dustan obtient les premiers prix de français et d'anglais au concours général. Élève au lycée Henri-IV, où il effectue sa khâgne, il refuse de passer le concours d'entrée de l'École normale supérieure1. Il suit alors le parcours classique Sciences Po-ENA (promotion 1991 Victor Hugo), avant de se lancer dans une carrière juridique. Juge administratif, il dirige, en 1994 et 1995, avec Marie-Anne Frison-Roche, La Justice. L'obligation impossible, pour la collection « Valeurs » des éditions Autrement ainsi que De l'injuste au juste, aux éditions Dalloz.
Il découvre sa séropositivité en 1989. Guillaume Dustan a alors une « double vie ». La journée, il est conseiller auprès d'un tribunal administratif et rédige des articles érudits pour les éditions Dalloz. En alternance, il découvre le monde de la nuit. Il expérimente la « drague » sur minitel rose, les backrooms et les rapports impersonnels avec des partenaires multiples. Il connaît ses premières expériences avec la drogue.
En 1994, à Paris, il rédige son premier roman, Dans ma chambre qu'il corrige sur épreuves à Tahiti où, entre-temps, il avait demandé son affectation en tant que magistrat. Dans ma chambre est publié aux éditions POL en 1996. Judith Perrignon, journaliste à Libération, écrit : « [Guillaume Dustan] laisse tomber la défroque de l'élite bourgeoise, troque ses prestigieux diplômes contre les tares d'une époque puritaine : il est pédé, séropositif, drogué et le fait savoir1. »
En 1997, il quitte Tahiti, se met en disponibilité de son administration et, revenu en métropole, il rédige un second récit, Je sors ce soir, publié chez le même éditeur en 1997. En 1998, toujours chez POL, il publie Plus fort que moi, dernier tome de ce qu'il considérait comme une trilogie « autopornographique ».
Il crée alors la collection « Le Rayon gay » aux Éditions Balland, dans laquelle il publie, en 1999, pour la première fois en France, Les Monologues du vagin. « Le Rayon gay » deviendra par la suite « Le Rayon ». Ce sera la première collection entièrement LGBT éditée en France.
Une cinquantaine de titres y seront publiés jusqu'à sa fermeture en 20032, dont trois titres de Guillaume Dustan : Nicolas Pages (1999, titre qui fait référence à l'écrivain et plasticien Nicolas Pages), Génie Divin (2001) et LXiR ou Dédramatison La Vi Cotidièn (2002).
Il reçoit le prix de Flore, en 1999, pour son roman Nicolas Pages.
La médiatisation vient avec la polémique sur le bareback. Act Up s'oppose à lui parce qu'il prône les relations sexuelles non protégées entre adultes consentants (le barebacking). Il est, en 2001, attaqué par Act Up, et notamment Didier Lestrade, membre historique de cette association, sur ses positions à ce sujet.
Ses apparitions médiatiques sont souvent remarquées : Guillaume Dustan se présente sur les plateaux perruqué (notamment à deux reprises chez Thierry Ardisson, dans Tout le monde en parle3), militant pour une « cohabitation pacifiste de l'homme et de la femme au sein d'un même corps. »
Il fait quelques apparitions au cinéma, en 2001, dans le court-métrage Les Éléphants de la planète Mars, de Philippe Barassat, et en 2003, dans Process, de C.S. Leigh.
En 2001, il intègre le jury de Prix Sade.
Entre 2000 et 2004, il réalise une vingtaine de vidéos expérimentales5, non commercialisées, et dont la distribution (restreinte) s'organisera après son décès.
En 2003, il participe à la revue littéraire Bordel, dirigée par Frédéric Beigbeder et Stéphane Millon.
En 2004, il publie Dernier roman chez Flammarion. La même année la revue Écritures lui consacre un numéro spécial intitulé « Danger Dustan / Engagement », constitué de textes inédits de l'auteur et d'articles critiques. L'année suivante, Flammarion édite son Premier essai.
Guillaume Dustan décède d'une intoxication médicamenteuse involontaire le 3 octobre 2005.
Il repose au cimetière du Montparnasse. Comme épitaphe, sur sa tombe, on peut lire : « J'ai toujours été pour tout être ».
Guillaume Dustan reconnaît plusieurs influences. Son style s'inspire incontestablement de la littérature anglo-saxonne, qu'il préfère au classicisme français, qu'il qualifie de « bourgeois ». Il écrit :
« Merde à la dictature du Vrai Roman, dans sa version de droite (classique avec un héros jeune et beau) ou de gauche (expérimental avec des chaises). La littérature bourgeoise française est tellement calquée sur les valeurs aristocratiques de distinction qu'elle a le plus grand mal à créer une littérature moderne. »
Ses trois premiers romans (Dans ma Chambre, Je sors ce soir, Plus fort que moi) apparaissent dès lors comme un « adaptation française » du style anglo-saxon, plus souple, plus oral, moins académique, plus déconstruit, plus subversif, avec tout ce que cela sous-tend en termes d'éclatement de la phrase, de libertés dans la ponctuation, la syntaxe et même les thématiques abordées (le corps, le sexe, la drogue, l'exploration du moi). Les influences les plus évidentes sont incontestablement celles de Bret Easton Ellis et Dennis Cooper dont les oeuvres sont basées sur la description clinique des faits (notamment sexuels), ce que note Dustan :
« Bret Easton Ellis m'avait montré la voie avec son minimalisme stylistique et son absence de « psychologie » au sens traditionnel du terme (l'intériorité des personnages n'est montrée qu'à travers le récit de leur action), pour son esthétique filmique, et bien sûr pour le trash-gore inédit10. »
Guillaume Dustan avoue son admiration sans limite pour Marguerite Duras, dont il salue la capacité à écrire avec du « mauvais français », à s'être libérée, à utiliser un style oral, donnant ainsi l'impression que tout le monde peut être écrivain. Il apprécie aussi en elle la figure militante, capable de prendre la plume à un moment où être une femme écrivain et artiste était loin d'être courant (et accepté). Il note d'ailleurs que « la littérature moderne (c'est-à-dire ayant échappé au patriarcat autoritariste) en France date de Duras »11, et cite abondamment La Vie matérielle, livre d'entretiens de cette dernière, pour parler de sa « culture littéraire » dans Nicolas Pages. Il évoque aussi son goût pour les oeuvres d'Hervé Guibert, dont il admire la mise en scène « gore-morbide » de soi et la capacité à transcrire (au-delà du pur acte sexuel) des relations amoureuses homosexuelles, et de Renaud Camus, dont il souligne « l'allégresse qui se dégageait encore à l'époque». Il publie d'ailleurs, en 1998, un texte-hommage à Renaud Camus.
Guillaume Dustan s'inscrit lui-même dans « le filon des écrivains de l'extrême : Sade, Artaud, Bataille, Genet, Guibert. »
En revanche il exprime une répulsion toute particulière envers certains écrivains, entre autres, Angelo Rinaldi (« un résucé de Proust en plus triste »), Borgès (« inventeur de fables qui se mordent la queue ») ou encore Alain Robbe-Grillet, « un escroc », et Claude Simon et Jean Rouaud : « Litanie, liturgie, léthargie... », écrit-il dans Nicolas Pages.
Parmi ses contemporains, Dustan fut rapproché de Christine Angot, son « alter-angot », selon une critique qui voyait chez les deux auteurs une même pratique de mise à nu frontale du moi autobiographique. La confrontation radicale entre la vie et l'écriture serait alors un point de rapprochement entre les deux auteurs. Dans son Premier essai, Dustan parle d'ailleurs des « écrivains des années 90 », ceux dont il reconnaît l'importance dans l'avènement d'une nouvelle littérature et d'un nouveau style : Vincent Ravalec, Virginie Despentes ou encore Michel Houellebecq.
Dans Nicolas Pages, Dustan radicalise ses aspirations littéraires, et note :
« C'est qu'il n'y a pas trente-six solutions en littérature : soit on invente tout et on s'expose à une relative pauvreté de détail (sauf à réintroduire des petites merdes vécues dans l'histoire inventée) ; soit on raconte sa vie et on s'expose à une relative faiblesse dramatique (sauf à faire des mutants en greffant des événements et des personnages les uns sur les autres). En fait j'ai envie d'être beaucoup plus radical. En littérature, soit c'est soi, soit c'est du bidon14. »
Des lors, l'oeuvre dustanienne est un « abandon de la grande fiction » au profit d'« une sorte de narration domestique14 ». Écriture acharnée du corps, du sexe, de la drogue, de la danse, du mouvement et du moi, l'oeuvre de Dustan propose une autofiction intégrale, sans - selon les dires de l'auteur - aucun ajout romanesque ou fictionnel : « Au début je pensais romancer, comme on dit. Changer des trucs. Mourir à la fin. Et puis je n'ai pas voulu15. » En outre, la psychanalyse et l'auto-psychanalyses émaillent tous ses textes, de même que les rapports de force entre hommes (sadomasochisme), la drogue (théorisation de la consommation et de l'exploitation corporelle et psychique de l'ecstasy, en particulier), sur fond de réflexion politique.
Chez Dustan, l'autofiction prend la forme d'une écriture perfomative, où la vie débouche vers l'écriture, et non le contraire. Lors d'une interview accordée à Fluctuat.net il déclarait :
« La question est de savoir pourquoi les gens écrivent. Pourquoi est-ce qu'on raconte des histoires, je ne sais pas moi. Je n'ai pas envie d'écrire des histoires. J'ai essayé et ça ne marchait pas. Et à un moment j'ai trouvé que j'avais une vie assez bizarre pour écrire dessus. J'ai été très influencé, d'abord marqué, puis influencé par la lecture des gens qui utilisaient le "Je". Et qui racontaient leurs choses. Leurs choses à eux. »
Mais à la question « Pourquoi aurait-on envie de raconter sa vie ? », Dustan répond :
« C'est plutôt l'inverse qui est surprenant. Il est étonnant que ce soit surprenant de demander pourquoi on a envie de raconter sa vie. J'ai plutôt l'impression que c'est ça qui est normal, en tout cas ce qui se comprend le plus facilement, non ? Ce qui est étonnant, n'est-ce pas l'inverse, c'est-à-dire qu'il y ait des gens qui passent autant de temps à raconter des histoires qui ne parlent pas d'eux. »
D'un point de vue thématique, l'oeuvre dustanienne se présente, dans un premier temps, comme une sorte « d'Odyssée du sex » :
« L'idée était d'écrire une sorte d'Odyssée, une histoire de ma vie sexuelle qui était aussi une découverte, un voyage dans les contrées sauvages et inconnues du sexe, peuplées de monstres divers. Ma « vie sexuelle ». Un truc en fait assez peu exploré par la littérature, alors que dans la vie de chacun il y a des transformations incroyables, profondes, dans le rapport à ces choses-là au cours de la vie ou de périodes suffisamment longues de la vie. Encore une fois l'idée était de donner de l'importance à des choses dont on ne parle pas et qui sont pourtant de l'essence même de la définition de soi. »
La trilogie dite « autopornographique » (néologisme crée par Dustan dans Génie divin) publiée chez P.O.L. explore alors trois « dimensions sexuelles » : celle de la sexualité quotidienne et domestique d'un homosexuel parisien des années 80-90 (Dans ma chambre), celle du « milieu » gay (Je sors ce soir) et celle du sadomasochisme (Plus fort que moi).
L'autopornographie serait ainsi une autofiction du « moi sexuel », dont l'exposition crue apparaît comme une ultime provocation, et l'urgence de l'écriture un des moteurs :
« Il était hors de question d'écrire sur ma vie honteuse, ma vie de rat. Impossible. Si j'ai pu écrire mon premier livre, c'est parce que je pensais que j'allais mourir. Dans un testament on est libre. On déshérite. J'ai déshérité mon père et tous les flics. J'ai dit que je me droguais et que je me faisais mettre. Les deux grands trucs politiquement incorrects17. »
Dans cette perspective, la sexualité, chez Dustan, se présente comme un libération. L'auteur plaide pour une sexualité sans protection entre adultes consentants (barebacking) en évoquant la liberté de chaque individu de se mettre en danger et de se débarrasser de l'autorité moralisante :
« Nous réclamons les religions de la jouissance. Nous le sommes : raves, backrooms, saunas, c'est cela la politique nouvelle. La nouvelle pornographie. La nouvelle vie. L'extrême. Pas le couvre-feu dix-neuvièmiste. Pas le backlash. Le feu. La libération18. »
Par la suite (dans, entre autres, Génie divin ou Premier essai), la construction des romans de Dustan est très spécifique : il s'agit le plus souvent d'une mise en perspective d'apparence anarchique de textes hétéroclites (récit, journal, articles, citations, courts essais) qui s'accompagne de variations dans la police des caractères (utilisation de l'italique, du gras, du souligné, changements fréquents de police). Dans Nicolas Pages, Dustan n'hésite pas à publier sur plus d'une dizaine de pages le journal tenu par sa grand-mère avant son décès en respectant scrupuleusement la graphie de celle-ci (les innombrables fautes d'orthographe et de syntaxe, les ratures, etc).
On peut distinguer, selon David Vrydaghs19, « trois moments dans la trajectoire de Guillaume Dustan. » Dans un premier temps, de 1996 à 1999, il est lentement propulsé sur le devant de la scène littéraire, ce qui fait de lui un écrivain culte dans le milieu homosexuel. Dans ma chambre est comparé à Tricks, de Renaud Camus, Guillaume Dustan fait quelques apparitions télévisuelles, notamment dans Le Cercle de minuit. L'écho médiatique commence à se former, c'est le début d'une forme de « starisation » littéraire.
Après cette « phase d'émergence », interviendrait « une phase intermédiaire, de 1999 à 2001, où Dustan cherche à constituer une position collective dans la niche où il travaille depuis ses débuts, comme à percer en littérature au moyen de textes formellement plus ambitieux, et proches, à bien des égards, de l'essai. » De fait, dans Nicolas Pages ou Génie divin, il fait de ses oeuvres des laboratoires d'expérimentations stylistiques remarquées par la critique. On note un « passage progressif au genre de l'essai, qui voit donc Dustan abandonner la littérature homosexuelle grâce à laquelle il s'était fait un nom pour une production à la fois littéraire et politique, située à l'intersection de la littérature et du champ intellectuel. » C'est également à cette époque qu'il commence à intervenir régulièrement dans l'espace public (dépassant ainsi largement le lectorat homosexuel de ses premiers écrits). Le prix de Flore encourage plus encore sa médiatisation, et lui vaut un long article dans les Inrockuptibles. Pourtant, Génie divin est contesté, dans le même magazine, en raison des « facilités du discours et des postures factices du divin qui font écueil à son ambition de génie».
En 1999, déjà, alors qu'il publie Nicolas Pages, est édité L'Inceste, de Christine Angot, qui se fera très présente dans l'espace médiatique. Dans Quitter la ville, cette dernière raconte la jalousie de Guillaume Dustan, qui lui aurait reproché de lui avoir « volé sa rentrée littéraire. »
David Vrydaghs constate alors que cette phase est suivie par une autre, qu'il qualifie de « phase de déclassement, de 2001 à sa mort en 2005, pendant laquelle Dustan n'est plus lu. » David Vrydaghs écrit : « Le déclassement de Guillaume Dustan, effectif à partir de Génie Divin, ne fait que se confirmer par la suite. Après avoir été remercié par Balland, Dustan quitte Paris pour Douai, puis Lille, où il écrit encore deux textes, Dernier roman et Premier essai, publiés chez Flammarion mais boudés par la critique au point, par exemple, que Jean Birnbaum, journaliste au Monde, ignore l'existence du dernier livre de Dustan dans sa notice nécrologique. Quant aux critiques qui connaissent ces deux livres, ils les jugent « illisibles ». »
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