Artiste, Écrivain, Philosophe (Art, Littérature, Philosophie).
Francais, né le 26 décembre 1867 et mort le 7 juin 1956
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Julien Benda, né le 26 décembre 1867 à Paris et mort le 7 juin 1956 (à 88 ans) à Fontenay-aux-Roses, est un critique, philosophe et écrivain français, principalement connu pour son ouvrage de 1927, La Trahison des Clercs.
Julien Benda naît en 1867 dans un milieu aisé. Son grand-père, Sigmund Benda, banquier belge originaire de Furth, un temps président du consistoire israélite, se suicide en mars 1848 après avoir fait faillite. Son père, Camille Benda (Bruxelles 1827-Paris 1890), qui se préparait à une carrière d'ingénieur, doit alors gagner sa vie. Arrivé à Paris en 1849, il débute comme employé de son oncle avant de monter la société d'exportation qui fera sa fortune. Il épouse en 1857 sa cousine Anne Caroline Weinschenk (Paris 1838-1916), issue de la communauté juive du Marais. Le couple, qui n'était pas religieux, était attaché aux valeurs léguées par la Révolution.
Au Lycée Charlemagne, où il est condisciple de Léon Daudet, il brille particulièrement en latin et en grec. Sa passion pour les mathématiques le conduit à préparer l'École polytechnique, mais il échoue à l'examen d'entrée. Il intègre l'École centrale, mais son peu de goût pour les sciences appliquées le fait abandonner à la fin de la deuxième année. Il entre alors à la Sorbonne où il passe une licence d'histoire.
La mort de son père en 1890 lui laisse de quoi vivre de ses rentes. Il mène une vie mondaine, vêtu avec élégance, fréquentant les salons, en particulier celui de sa cousine Pauline Benda (l'actrice et romancière Madame Simone), voyageant et lisant. À partir de 1913, après la faillite de la maison d'exportation dont il avait hérité, c'est de son métier d'écrivain qu'il devra vivre.
Il a trente ans lorsqu'éclate l'affaire Dreyfus. En 1898, Séverine lui permet de publier son premier article, « Notes d'un Byzantin », dans la Revue blanche. S'il prend fait et cause pour le capitaine, c'est au nom des principes, se défendant d'éprouver le moindre sentiment pour les souffrances de la victime et fustigeant ceux des juifs qui ne s'en préoccupent que par esprit communautaire. Il publie dans la Revue blanche jusqu'en 1903.
Il se lie à Charles Péguy dont il devient très proche, sans doute en raison de leur situation à part dans le milieu intellectuel et d'un mépris commun pour la bourgeoisie (ce que Daniel Halévy qualifiera de « complicité d'amertume »). Il est édité de 1903 à 1910 par les Cahiers de la Quinzaine. Parmi ses premiers livres, un roman, L'Ordination, se retrouve finaliste pour le Prix Goncourt 1912. L'auteur attribuera son échec à la présidence de Léon Daudet, à ses propres origines juives et à son activité passée de dreyfusard. De 1912 à 1914, il consacre trois ouvrages à attaquer sur un ton polémique la philosophie de Bergson, alors très en vogue dans les salons qu'il fréquente. Dès lors, son ton, son angle d'attaque et sa technique sont trouvés : réfugié dans le monde des idées intemporelles, il caricature la pensée de son adversaire sous couvert d'une analyse impartiale, usant d'un ton caustique et d'un humour mordant servis par un style néo-classique. Procédé qu'Édouard Dolléans résumera dans sa critique d'Une philosophie pathétique par : il « construit des fantoches de paille auxquels ensuite il est aisé de mettre le feu ».
Il entre au Figaro en 1916, s'y répandant en articles guerroyeurs. C'est au nom encore de l'objectivité qu'il entend démontrer la seule responsabilité de l'Allemagne dans la guerre et dénonce l'influence de la pensée allemande du moment, subordonnant la justice à la force.
En 1918, Belphégor : essai sur l'esthétique de la présente société française connaît un certain succès. Il y taille en pièces le goût de son temps, dénonçant le romantisme, le sensualisme, le sentimentalisme, le goût du flou et de l'imprécis, tout comme il avait attaqué l'intuitionnisme bergsonien, au nom de l'intellectualisme et de la raison. Il racontera dans ses souvenirs comment, alors qu'il était bon pianiste, il en est venu à abandonner la musique parce que le plaisir sensuel qu'elle lui apportait troublait sa pensée.
L'insuccès de son roman Les Amorandes (1922), dont il espérait qu'il lui vaudrait de pouvoir postuler à l'Académie française, l'ébranle à tel point qu'il se retire quelque temps de la vie littéraire; il faut attendre 1927 pour qu'il publie le livre qui fera sa renommée.
En août 1929, Julien Benda publie à la NRF une longue « Note sur la Réaction » où il élabore une typologie de la réaction, c'est-à-dire du « mouvement d'opposition au régime démocratique en France depuis qu'il y existe ». Il en dissèque les deux variantes principales : le réactionnarisme sentimental ou passionnel, fondé sur l'intérêt lésé ou sur l'orgueil blessé, et la réaction idéologique ou doctrinaire, de formation savante, qu'il identifie à l'Action française. En lisant cet exposé didactique mais décapant, il ne reste aucun doute : tout sépare Benda du champ réactionnaire et, concrètement, du mouvement de Maurras qui, à l'époque, dirigeait en France la lutte contre la démocratie et la République. À l'opposé d'Action Française, Benda ne remet point en cause les Lumières ou la Démocratie, et sa passion pour une raison abstraite, mathématique et universelle lui fait abhorrer toute pensée ancrée dans une patrie, un peuple, une race ou un sol. Les accusations de réactionnarisme dont Benda est parfois l'objet (voir plus bas) confondent réaction et goût esthétique antimoderne.
Deux ans auparavant Julien Benda avait publié son chef-d'oeuvre, La Trahison des Clercs, qui reprochait aux intellectuels d'avoir quitté le monde de la pensée désintéressée et des valeurs abstraites et intemporelles pour se commettre dans le combat politique un plaidoyer contre l'adoption par les « clercs » des « passions politiques » de race, nation, classe ou parti, c'est-à-dire l'antisémitisme, la xénophobie, le nationalisme, le militarisme, le nationalisme juif, le « bourgeoisisme », le marxisme et ainsi de suite, à droite et à gauche. Benda y fustigeait « la tendance à l'action, la soif du résultat immédiat, l'unique souci du but, le mépris de l'argument, l'outrance, la haine, l'idée fixe », en bref tout ce qui fait la passion politique des hommes d'action (les « laïcs ») et tout ce qui doit rester étranger au savant et au moraliste, c'est-à-dire au clerc. Il n'y condamnait cependant pas absolument l'engagement de l'intellectuel, exigeant que celui-ci ne descende sur la place publique et n'intervienne dans le débat séculier que pour faire triompher les idéaux abstraits et désintéressés du clerc : la vérité, la justice, la raison, la liberté intellectuelle et sociale. Ainsi ne reniait-il rien, par exemple, de son engagement dreyfusard, puisqu'il s'agissait de lutter pour la vérité et la justice, valeurs cléricales, et cela au mépris de l'ordre et des contingences politiques, valeurs laïques.
D'une certaine manière, La Trahison des Clercs ne fait que retourner une accusation de trahison contre ceux même qui, par « passion politique de race ou nation », en avaient usé pendant l'Affaire et en abusaient depuis toujours. Une accusation autrement grave, celle que Benda leur retourne, car il ne s'agit plus d'une fausse haute trahison à la nation, mais d'une véritable trahison à la mission de l'intellectuel en tout pays, celle de gardien des valeurs humaines et spirituelles les plus abstraites et universelles. Voilà pourquoi La Trahison des clercs provoque la rage contre Benda dans les rangs de la droite littéraire et de l'Action Française, qui le traitent de « Rabbi Bendada », de « gnome étranger » et de « clerc de lune ».
La Trahison fait du bruit, et Jean Paulhan, qui l'a pré-publiée dans la NRF, accueille Benda dans la revue et lui publie tout ce qu'il écrit. Il y occupera jusqu'en 1940 une place de plus en plus importante dans le domaine politique, bien qu'il n'y ménage personne, et surtout pas les collaborateurs d'une revue qu'il juge « belphégorienne ». Plus tard, Benda ne s'empêchera pas de publier un article intitulé « Un fossoyeur de la France : Jean Paulhan ». C'est vrai qu'il ne le fera qu'en réaction à la critique de l'ensemble de son oeuvre que Paulhan avait publiée quelques mois auparavant intitulée "Benda, le Clerc malgré lui".
Jusqu'à la guerre, Julien Benda est un chroniqueur abondant, influent et redouté, qui publie dans de nombreux journaux. Intellectuel engagé, il le sera à l'extrême : la tour d'ivoire où il se prétend retiré est en fait un mirador d'où il mitraille tous ceux qu'il accuse de trahir la fonction de clerc. S'affichant comme un représentant de la pensée désintéressée, en somme comme un clerc digne de ce nom, il ferraille inlassablement contre l'Action française, le fascisme, l'invasion de l'Éthiopie par l'Italie de Mussolini, l'abandon de la république espagnole, la menace hitlérienne, le pacifisme, les accords de Munich. Devant les deux menaces du communisme et du fascisme, il choisit sans hésitation le communisme, estimant qu'au moins, si celui-ci doit tuer, il le fera au nom des opprimés.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, vingt ans après la première publication, Benda réédite La Trahison, qu'il considère conserver encore toute son actualité, sauf peut-être sur un point, qu'il éclaircit dans une nouvelle préface : en France, avec la collaboration, ce n'est plus uniquement leur mission de gardiens des valeurs universelles que certains clercs trahissent, c'est aussi, « expressément », leur patrie.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il se retire en 1942 dans la région de Carcassonne, puis de Toulouse, où il vit dans la clandestinité, semblant prendre plaisir à cette existence monastique (« Je suis poussé à rédiger ces pages parce que grâce à une solitude quasi totale que m'imposent depuis quatre ans les circonstances et à l'absence de toute dissipation due à aucun appel du dehors, j'ai durant ce temps exercé mon esprit dans l'entière vérité de sa nature et crois avoir pris de celle-ci une conscience plus nette que jamais », écrit-il dans Exercice d'un enterré vif). Il lit la Torah et les Prophètes, publie aux Éditions de Minuit clandestines des articles sous le pseudonyme de Comminges, et La grande épreuve des démocraties, qui devait paraître chez Gallimard, est publié à New York en 1942.
Épurateur intransigeant après la Libération, il refuse tout pardon aux collaborateurs, bien à l'opposé de Jean Paulhan, médaille de la Résistance, qui prend leur défense. Continuant un mouvement amorcé avant guerre, il devient un compagnon de route des communistes, collabore à leur revue Les Lettres françaises, et va même jusqu'à comparer, en 1949, les aveux de l'espion Esterházy dans l'affaire Dreyfus à ceux arrachés à László Rajk à Budapest, dans le procès truqué qui verra sa condamnation à mort. Bien qu'il n'ait jamais chanté, comme Aragon, le « grand Staline » qui faisait « fleurir le printemps », Benda succombe finalement à la tentation qu'il dénonçait, trahissant lui-même à quatre-vingt-deux ans la mission de gardien de la vérité et de la justice. Son dernier livre date de 1952. En mai 1954 il publie encore, à la NRF, « Qu'est-ce que la Critique ? ». Il meurt en 1956. Son épouse née Micia Lebas est décédée en 1988 à 97 ans.
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Les meilleures citations de Julien Benda.
Il suffit d'ouvrir un manuel de littérature grecque ou latine pour constater que les belles époques littéraires sont d'un demi-siècle alors que les littératures dites de décadence durent six cent ans.
Autrefois, les écrivains dénués de métier voulaient passer pour en avoir ; aujourd'hui ceux qui en sont farcis veulent nous faire croire qu'ils ne savent même pas ce que c'est. Tel est le progrès.
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