Artiste, Écrivain, Parolier (Art, Littérature, Musique).
Francais, né le 6 mai 1851 et mort le 11 février 1925
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Cela fera 100 ans que Aristide Bruant est mort le mardi 11 février 2025. Plus que 82 jours...
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Aristide Bruant (né Aristide Louis Armand Bruand le 6 mai 1851 à Courtenay, et mort à Paris le 11 février 1925) est un chansonnier et écrivain français. Ses chansons populaires, sa présence en scène, sa voix rauque et puissante et sa carrure ont fait de lui un monument de la chanson française. Il est considéré comme un des plus grands poètes de l'argot de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle.
Il a été l'un des créateurs de la chanson réaliste, mouvement qui a duré jusqu'aux milieu du XXe siècle avec notamment Édith Piaf comme l'une des dernières interprètes. Ce mouvement a laissé des traces durables jusque dans la chanson française contemporaine.
Aristide Bruant est né dans une famille bourgeoise. Durant son enfance, il apprend le latin par les soins du curé du pays, qui le cite comme exemple d'application. Sa famille l'envoie ensuite au lycée Impérial de Sens, où, dès l'âge de onze ans, il collectionne les premiers prix de grec, de latin, d'histoire et de musique vocale. En 1862, il compose sa première chanson.
À la suite de revers de fortune, ses parents doivent quitter Courtenay pour Paris, où les déménagements vont se succéder. Afin de fuir les créanciers, de 1863 à 1867, de Ménilmontant à Montmartre, ils effectuent cinq déménagements.
À la fin de l'année 1867, il doit quitter le lycée Impérial, car son père alcoolique et ruiné n'avait pu payer les derniers trimestres. Son père décide alors qu'Aristide est en âge de travailler et le conduit chez un avoué. Il peut ainsi faire vivre toute sa famille. Mais, du fait de la traque régulière de ses parents par des huissiers, il doit changer de métier et devient apprenti-bijoutier, puis ouvrier-bijoutier.
Il travaille alors l'or et l'argent et sertit des pierres précieuses dans les arrière-boutiques de quelques bijoutiers. Il suit ses parents à travers Paris et la banlieue, fréquentant les restaurants pour pauvres, les cafés d'ouvriers, côtoyant les malheureux, les révoltés, les filles et les mauvais garçons. Il écoute leurs confidences et s'initie à leur contact à leur jargon.
Pendant la Guerre de 1870, il est engagé comme franc-tireur dans la compagnie des « gars de Courtenay ».
Démobilisé, il travaille à la Compagnie des chemins de fer du Nord. Durant quatre ans, il regarde vivre ses collègues et compare leur existence trop bien réglée à la vie aventureuse de hors-la-loi qu'il a rencontrés. Il se passionne pour leur langage, se met à rechercher les origines de l'argot jusqu'à François Villon et aux coquillards et travaille sur les dictionnaires d'argot des bibliothèques municipales. En attendant d'écrire des refrains argotiques, il compose des romances tendres.
Léon de Bercy en 1898 évoque les débuts d'Aristide Bruant dans les goguettes. C'est là qu'il trouve son premier public :
Au lendemain de l'Année terrible, je dirai tout à l'heure quelle y fut sa conduite, à dix-neuf ans, Bruant pour vivre, entre à la Compagnie du chemin de fer du Nord. Mais il aime le théâtre, et la vie sédentaire, la vie de bureau lui pèse : il rêve d'affranchissement, et le soir, durant les heures de loisir que lui laisse son existence d'employé, il court les goguettes, où il pousse la « sienne » comme les camarades. Il a de l'allure, du coffre et de la confiance en lui-même; sa hardiesse et sa franchise le servent à souhait : on l'encourage. C'est alors qu'il écrit ses premières chansons, d'un caractère encore indécis mais d'une manière nouvelle, originale déjà; car il y emploie la langue colorée de la rue, langue du peuple, avec ses élisions et son patoisement pittoresques. Il se débarrasse peu à peu des conventions banales; il devient le rimeur impeccable; et, après avoir pris au peuple sa façon de s'exprimer, il va en prendre la pensée et la rendre, pour la servir : sa voie est trouvée.
Il est remarqué par un chanteur qui l'encourage à aller se produire au « Robinson », où il triomphe.
Fort de ce succès, il tente sa chance au café-concert et se produit au « Concert des Amandiers ». Bien que le public y fût difficile, il triomphe à nouveau, ce qui lui donne de plus en plus d'assurance. Son répertoire comprend alors des chansonnettes comiques ainsi que des chants sociaux.
Un impresario le remarque et il est engagé chez Darelli à Nogent-sur-Marne, où il connaît à nouveau le succès. Il commence aussi à vivre dans une certaine aisance. Ces succès l'incitent à aller auditionner au « Concert de l'Époque ». Là, il se compose un costume de vedette : veston long, pantalon à pattes d'éléphant, gilet clairet et chapeau haut-de-forme. L'effet est merveilleux, il connaît l'ivresse des rappels. Jusqu'au jour où il est incorporé au 113e de ligne, à Melun. Opportuniste, il écrit aussitôt une marche militaire : V'la l'cent-treizième qui passe. Adaptée au pas redoublé par le chef de musique du 113e, cette marche devient non seulement la marche du régiment, mais celle de la plupart des régiments de France.
Sa renommée commence à s'étendre. Dès sa démobilisation, il franchit rapidement les étapes. Des tréteaux Concert de l'Époque, il passe sur les scènes des plus grands cafés-concerts, « la Scala » et « l'Horloge ». Chanteur élégant, il porte une jaquette beige rosé et un gilet fleuri (d'un bon faiseur), ainsi qu'un chapeau haut-de-forme sur-mesure. C'est de cette époque que datent les premiers chefs-d'oeuvre qu'il compose sur les quartiers de Paris.
Aristide Bruant est alors chanté par des interprètes illustres tels que Paulus et son ami Jules Jouy, qui va lui ouvrir les portes du « Chat Noir » en 1881.
Le Chat noir, cabaret artistique à la mode, avait été aménagé par Rodolphe Salis dans un ancien bureau de poste situé au 84, boulevard Rochechouart à Paris.
Pour sa réception au sein de ce cénacle, fréquenté par l'élite poétique, il compose la Ballade du Chat Noir, chanson restée célèbre jusqu'à aujourd'hui. Bruant troque alors le cérémonieux complet-jaquette contre une tenue de garde-chasse, vareuse de velours côtelé noir avec culotte assortie, enfoncée dans de grosse bottes noires, chemise et cache-nez écarlates, en guise de manteau une immense cape noire et, comme couvre-chef, le feutre noir à large bords que son ami Toulouse-Lautrec a souvent croqué de face, de profil ou de dos. Il explique ainsi sa transformation : « Le guignol est terminé!... Un nouveau Bruant est né!... Et ce Bruant-là va dire deux mots à la foule des fils-à-papa, des fainéants, des incapables !... Il leur criera la haine menaçante des pauvres et des révoltés... ainsi que la douleur blottie dans les bas-fonds... »
Un chanteur en costume de velours, qui met ses bottes sur les tables pour chanter des refrains argotiques, c'est une nouveauté que la clientèle du Chat noir apprécie. Il est applaudi tous les soirs. Mais le patron de l'établissement ne le paye pas et se contente de l'autoriser à vendre des sortes de petits formats dans la salle, ce qui ne lui rapporte que de maigres revenus. La fortune ne commence à sourire au chansonnier que lorsque Rodolphe Salis, effrayé par les voyous du quartier, abandonne le cabaret du boulevard Rochechouart, pour installer le Chat noir rue Victor Massé, une petite rue parallèle au boulevard. Avec mille francs prêtés par un admirateur, il s'installe alors dans un local déserté qu'il baptise « le Mirliton », du nom d'un instrument de musique populaire et bon marché.
Le soir de l'inauguration du Mirliton, il n'y a que trois clients. Dépité, il se met à les insulter copieusement : le public apprécie. C'est ainsi qu'il crée son image de marque. Par opposition au style affecté de Rodolphe Salis, gentilhomme d'opérette, il choisit la grossièreté. Tandis que Rodolphe Salis saluait ses clients du titre de monseigneur, Bruant les appelle crapules. Lorsque Rodolphe Salis affectait la tenue d'un général en civil, bruant s'habille en gouape. Chez Bruant, pour saluer l'arrivée d'un client on chante : « Oh c'te gueule, c'te binette. »
Ensuite, debout sur une table, Aristide Bruant donne d'une voix forte ses instructions aux gens du monde par la renommée : « Tas de cochons ! Gueules de miteux ! Tâchez de brailler en mesure. Sinon fermez vos gueules. » Si quelques jolies dames se montraient offensées, le maître de céans leur parle avec une très grande franchise : « Va donc, eh, pimbêche ! T'es venue de Grenelle en carrosse exprès pour te faire traiter de charogne ? Eh bien ! T'es servie ! » Il ajoutait même parfois : « Vieille vache ! »
La verdeur de ces propos, ainsi que les affiches qu'il commande à son ami Toulouse-Lautrec, ne sont pas les seules raisons de son succès. On se déplace d'Auteuil ou de Passy pour l'écouter chanter les peines et les joies de la crapule, alors à la mode, avec, à l'époque, les ouvrages des écrivains naturalistes. Son répertoire de qualité se répand en même temps que les oeuvres de Zola, de Paul Adam, des frères Goncourt, d'Oscar Méténier ou de Joris-Karl Huysmans.
Au Mirliton, le verre de bière est vendu treize sous, mais devant l'évolution de son public, Aristide Bruant décide d'instituer chaque vendredi une soirée « chic ». Ainsi, le vendredi le verre de bière est vendu cinq francs (cent sous). Des célébrités comme François Coppée, Lucien Guitry, le dompteur Pezon font partie des habitués de ces vendredis chics, entourés de bourgeoises endimanchées, ravies de s'entendre injurier par le « grand Bruant ».
La publication du premier volume de ses oeuvres, monologues et chansons intitulé Dans la rue, illustré par Steinlen, fait sensation : de Maurice Barrèsà Anatole France « Le premier, Bruant a exprimé le pathétique de la crapule... » , les critiques sont enthousiastes. Chacun salue le « poète sincère et vibrant, d'une rare originalité ». François Coppée le fait recevoir à la Société des gens de lettres en 1891 ; il ne ménage pas ses éloges au comité des gens de lettres : « Je fais grand cas de Dans la rue et je le tiens pour un descendant, en ligne directe légitime, de notre Villon... ». C'est la réussite : ses chansons sont mises aux répertoires d'artistes célèbres : Eugénie Buffet, déguisée en fille de barrière, fait applaudir, À la Cigale, À la Villette et À la Glacière, et lance À Saint-Lazare ; Yvette Guilbert, vedette du caf'conc', interprète À Belleville et Au Bois de Boulogne. Bruant atteint alors une gloire internationale et en 1895, il abandonne son cabaret et part en tournée à l'étranger.
Bruant se revendique comme un travailleur sérieux. Dans sa poésie apparemment simple, la puissance du raccourci et la précision du terme dissimulent de longues recherches : « sept mois pour une chanson ! » a-t-il déclaré à propos de À Biribi. Il lui faut moins de temps pour composer les mélodies qu'il veut nostalgiques et dépourvues de fioritures, à la manière de celle des cantiques de son enfance.
Avec la gloire, la fortune récompensa ses efforts ; aux bénéfices du Mirliton vinrent s'ajouter de confortables droits d'auteur et de gros cachets. Ainsi, après une dizaine d'années, il put s'offrir un château à Courtenay, grâce à Nini Peau d'Chien, à la Méloche, à Toto Laripette et à la Filoche, marlou héroïque qui mourut avec dignité sur l'échafaud.
En 1897, le célèbre critique Adolphe Brisson a fait le récit d'une visite à Bruant, à Courtenay, dans Portraits intimes :
« Le poète des gueux habite un château où il mène le train d'un seigneur moyenâgeux, il chasse, il pêche, il a une meute de chiens fidèles et dressés. Ses vassaux sont représentés par un garde, le père Rata, un jardinier, le père Bajou, et un fermier et une nombreuse domesticité. Les pièces de son logis sont luxueusement meublées de bahuts, de fauteuils, de bibelots. Il me raconte qu'il a acheté vingt-cinq hectares de prairies, un bras de rivière, une île, un moulin. M. Bruant est un autre marquis de Carabas ! »
Le chansonnier populaire, le fondateur du Mirliton, que l'on aurait pu croire attaché à Montmartre, sa seconde patrie si souvent chantée, tint à Adolphe Brisson des propos révélateurs :
« Pendant huit ans, j'ai passé mes nuits dans les bocks et la fumée ! J'ai hurlé mes chansons devant un tas d'idiots qui n'y comprenaient goutte et qui venaient, par désoeuvrement et par snobisme, se faire insulter au Mirliton... Je les ai traités comme on ne traite pas les voyous des rues... Ils m'ont enrichi, je les méprise : nous sommes quittes ! »
Et contemplant son vaste domaine, le millionnaire de la chanson des humbles, ajouta :
« On respire ici !... ce n'est pas comme à Montmartre !... je suis rudement content d'être sorti de ce cloaque ! »
On devait cependant le revoir à Montmartre, aux Champs-Élysées, ou à Belleville. En mai 1898, le châtelain de Courtenay se présenta aux élections législatives à Belleville, dans le quartier des ouvriers de Saint-Fargeau. On pouvait lire, sur les murs de Belleville, des déclarations de Bruant le « Candidat du peuple » : « Tous les ennemis de la féodalité capitaliste voteront pour le poète humanitaire, pour le glorieux chanteur de Belleville. C'est à Belleville Saint-Fargeau que Bruant a débuté, c'est à Belleville qu'il a connu ses premiers succès, c'est à son vieux Belleville qu'il revient logiquement par reconnaissance, etc. »
En dépit des multiples réunions électorales au cours desquelles il chanta une partie de son répertoire ainsi que son programme politique, il obtint seulement 525 voix.
Peu à peu, au début du XX siècle, il se retire de la chanson pour se consacrer à l'écriture, mais continue à donner des spectacles, jusqu'à un ultime retour en 1924, où il fait un triomphe. Il meurt à Paris l'année suivante, en 1925. Il est enterré à Subligny, dans l'Yonne.
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